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Interview de Bernard Maitenaz, inventeur des verres progressifs

Mais qui a inventé les verres progressifs ? 

C'est un ingénieur français, Bernard Maitenaz, qui dans les années 50 s'est investi avec pugnacité pendant une décennie de recherche pour créer en 1959 le premier verre progressif. Commercialisé sous la marque "Varilux", cette belle aventure humaine a marqué l'histoire de l'industrie française et le paysage de l'optique au niveau international, mais surtout transformé la vie quotidienne de centaines de millions de porteurs de lunettes partout dans le Monde.   

Monsieur Maitenaz est aujourd'hui retraité, toujours curieux et au fait des dernières innovations, cet homme exceptionnel a accepté de répondre à une interview pour le Guide de la Vue.
 

Le Guide de la Vue : Pouvez-vous nous raconter l'histoire de votre invention, comment vous est venue cette idée ?

Bernard Maitenaz

En  résumé, dans les années 50, c’est la brutalité optique des double-foyers, face à la douceur et la continuité de la fonction naturelle qu’ils devaient corriger, qui m’a révolté. Curieusement, je n’étais pas concerné par cette anomalie, puisque j’avais une vingtaine d’année et que mon accommodation était intacte… J’ai même dû demander à mon père de tester les premiers prototypes réalisés… Ma motivation était donc principalement altruiste. 

Mais aujourd’hui, je suis heureux de profiter du résultat obtenu, et de pouvoir apprécier, comme des centaines de millions de presbytes, le confort visuel apporté par "Varilux". 

En 1947, lorsque je poursuivais mes études d’ingénieur à l’Institut d’Optique de Paris, j’ai réalisé combien l’œil était un organe merveilleux et méconnu. Comme tous les organes du corps, son fonctionnement nous paraît normal, mais il est rare que l’on prenne conscience de ses performances.

Réfléchissons une minute : Il permet de voir latéralement et verticalement sur près de 180°, d’apprécier des nuances de couleurs à l’infini, de s’adapter à la lumière éblouissante d’un plein soleil ou à celle d’une bougie… 

Dotés de deux yeux, nous percevons le relief, et, tout en gardant une vue périphérique globale, nous pouvons  saisir un détail dans le champ visuel, de loin comme de près, et le suivre dans l’espace, sans discontinuité… ! Quelle merveille !

Mais l’œil a un petit défaut, il vieillit, et à partir de 45 ans, le cristallin ne permet plus une accommodation suffisante, la lecture de près devient difficile, et les bras semblent trop courts…


Prenant conscience de ces performances remarquables, j’ai réalisé alors combien étaient « primitifs » les moyens utilisés pour compenser la faiblesse du cristallin (la presbytie) : on utilisait des verres à double-foyer… !                                                          

En fait, pour compenser la baisse de cette merveilleuse fonction, souple et continue, on avait recours à un moyen optiquement brutal, les double-foyers, qui, en plein centre du champ visuel, cassaient l’image avec leur petite fenêtre, et créaient un «espace  flou » entre les objets proches et les objets lointains.

Illustration de verres "double foyer "


 

 

 

L’esprit encore plein de cette « Géométrie dans l’espace » qui m’avait passionné quelques années auparavant, une évidence s’est alors imposée à moi : un verre progressif apportant de façon continue le supplément de puissance dont l’œil avait besoin, serait infiniment plus confortable que le double-foyer, que j’assimilais alors à « un instrument de torture ».

Cet apport progressif de puissance devait pouvoir être obtenu facilement, puisque nous avions la chance de disposer (et c’est le seul cas en optique), d’un grand verre fixe derrière lequel l’œil tourne à la demande, avec une pupille efficace toute petite… Il suffirait donc de faire varier la puissance du verre le long de sa section verticale, pour que le petit pinceau lumineux utile trouve le complément de puissance nécessaire pour former une image nette sur la rétine. 

 Nous étions au début des années 50. Tous les verres correcteurs à cette époque, étaient en verre minéral, et je savais combien ce matériau était difficile à travailler. Générer une surface complexe, la doucir, la polir seraient donc une aventure pleine d’embuches et de défis, et il faudrait recommencer sur chaque exemplaire, car, contrairement à la matière plastique, il n’y a pas de moulage possible en minéral. Mais les études d’ingénieur mécanicien que j’avais suivies quelques années auparavant me rendaient optimiste, et j’imaginais déjà des solutions mécaniques pour affronter chacun de ces problèmes…

La suite a montré que j’avais raison d’être optimiste, mais les problèmes à résoudre se sont révélés plus nombreux et plus difficiles que je ne l’avais imaginé. En réalité, il a fallu près de 10 années d’un travail acharné avec ma petite équipe pour aboutir industriellement à la création du premier verre progressif, commercialisé sous la marque « Varilux » : la première génération de « Varilux » était née!

Pour les matheux, les scientifiques et les curieux : en savoir plus  Image retirée.

Varilux fut présenté en 1959 et reçu un accueil mitigé, où se mêlaient l’intérêt et le scepticisme. 

Au cours des années suivantes, la gamme initiale limitée à « l’addition 1.50 », c’est-à-dire pour les presbytes jusqu’à 50 ans environ, fut progressivement étendue. 

Après « Varilux 2 » présenté en 1972, les principales difficultés de réalisation ayant été résolues, les études se sont focalisées sur le confort visuel. Les préoccupations initiales, à dominantes géométriques, ont donc cédé le pas aux considérations physiologiques.

C’est à la fin des années 1980 que Varilux connu un succès international grâce à la version organique, Varilux-Orma, commercialisée en 1976.

De nombreuses innovations suivirent, et partout dans le Monde, l’adhésion des porteurs de lunettes fut à la hauteur des progrès technologiques : remarquables.

Les années et décennies suivantes, les moyens de calculs ayant fait des progrès considérables, des paramètres de plus en plus nombreux ont pu être pris en considération, et entrer dans l’élaboration des designs successifs : profession, posture, mouvements des yeux et de la tête, monture utilisée, centre de rotation de l’œil, vision binoculaire, œil directeur… pour ne citer que les principaux. 

Parallèlement, les moyens technologiques ont beaucoup évolué, et les designs les plus récents s’appuient sur des approches modernes très sophistiquées comme la Réalité Virtuelle et le Surfaçage Digital. 

Grâce à ces nombreux perfectionnements, le confort visuel a pu atteindre un niveau très élevé, inespéré au départ.

Aujourd’hui, le souci d’abaisser le prix de vente conduit parfois à regrouper sur une seule face la prescription et la progression de puissance, mais lors des calculs, le nombre plus limité de degrés de liberté, conduit à des designs moins performants.

Bernard Maitenaz. Le 19 avril 2012
Photos communiquées par B.Maitenaz, avec tous nos remerciements.

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