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#Evénements

01/12/2023

Le magazine Le Guide de la Vue décembre 2023 est paru !

Le Guide de la Vue Le mag N°40 est disponible, il consacre un dossier exceptionnel sur l'histoire et les avancées majeures de l'Institut de la Vision à Paris.

Parce que l’âge est un facteur de risque majeur dans les pathologies de la vision, nous avons consacré ce numéro à différents thèmes autour du vieillissement et des déficiences qui lui sont associées. Nous faisons ainsi le point avec le Pr Zanlonghi sur les déficiences visuelles de l’adulte et de la personne âgée, nous attardons sur le glaucome en discutant avec le Pr Baudouin des dernières avancées thérapeutiques, et notamment chirurgicales. L’enjeu, passer une fois encore le message que la déficience visuelle n’est pas une fatalité en cas de glaucome, et qu’une prise en charge précoce peut stabiliser la maladie. Enfin, à travers le travail de la toute jeune Dr Marion Durteste, dans l’équipe du Dr Angelo Arleo, nous explorons l’idée que la perte de mémoire spatiale pourrait être liée à un défaut de perception visuelle. Les résultats de cette thèse sont porteurs de beaucoup d’espoir pour l’adaptation de l’environnement aux seniors et la mise en place d’exercices dédiés pour travailler la mémoire. Et puisque les grandes épopées scientifiques sont avant tout le fait d’humains tenaces et inspirés, nous avons également voulu dans ce numéro vous faire partager celle de la création d’un pôle de recherche à la pointe de l’ophtalmologie mondiale, dont nous relayons les travaux dans chacun de nos numéros, l’histoire de l’Institut de la Vision. C’est une aventure à peine croyable, récit de résilience et d’implication aux côtés des patients, qui, nous l’espérons, vous inspirera autant que nous.

Au sommaire de ce numéro Le Guide de la Vue de décembre 2023 :

  • L’Institut de la Vision, histoire d’une pugnacité collective, entretien avec le Pr José-Alain Sahel, et 13 avancées majeures à l'Institut de la Vision entre 2010 et 2023.
     
  • Glaucome : le point sur les traitements.
     
  • Perte de mémoire spatiale, et si le déficit était (aussi) visuel ?
     
  • Les déficiences visuelles chez l’adulte et la personne âgée.

 

Remerciements :

Le Guide de la Vue remercie ses partenaires qui, grâce à leur sponsoring, permettent la réalisation des rédactions et la diffusion du magazine auprès de tous les ophtalmologistes de l'Hexagone.

Vous trouverez ci-dessous un aperçu du magazine et un lien d'abonnement.

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#Santé

22/11/2023

Perte de mémoire spatiale, et si le déficit était (aussi) visuel ?

Difficultés à se souvenir où ont été posées les clés, de l’emplacement d’un produit fréquemment acheté dans les rayons du supermarché, du trajet pour se rendre à tel ou tel endroit… c’est un fait connu, avec l’âge, la mémoire spatiale s’altère. Ce processus impacte négativement la qualité de vie de personnes âgées en bonne santé par ailleurs. Il a été attribué à un déficit des fonctions cognitives supérieures, qui traitent les informations et permettent leur association. Mais une recherche publiée cet été par une équipe de l’Institut de la Vision vient réinterroger ce consensus. L’effet de perte de mémoire pourrait être également dû au vieillissement des systèmes perceptifs eux-mêmes, et ne concerner qu’une partie du champ visuel ! Entretien avec la Dr Marion Durteste, auteure de ces travaux qui s’inscrivent dans le cadre de la thèse en neurosciences cognitives qu’elle a soutenue début novembre 2023.

 

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Marion Durteste, PhD, dans l’équipe d’Angelo Arleo : « Vieillissement visuel et action »

 

Se déplacer dans notre environnement nous demande de percevoir et sélectionner des repères pertinents au sein d’un flot d’informations complexes. Or, ce traitement des informations évolue au fil de la vie. L’équipe Vieillissement visuel et action de l’Institut de la Vision s’intéresse ainsi à la façon dont les personnes âgées s’orientent dans l’espace. En effet, des travaux antérieurs ont montré que la stratégie de navigation spatiale des seniors met à profit la géométrie de l’espace, la longueur des murs, au détriment des objets et bâtiments présents autour d’eux, contrairement aux personnes plus jeunes. « Cela corrèle bien avec la façon dont la marche se modifie chez les personnes âgées. Souvent, on a des personnes qui regardent de plus en plus vers le bas à mesure qu’elles vieillissent, par peur de tomber, ou à cause d’un affaissement des épaules. Or, ce qui persiste lorsqu’on regarde vers le sol, ce sont ces repères géométriques, le plus souvent présents en bas de notre environnement, alors que les repères visuels de type monument, souvent placés plus loin, se trouvent essentiellement dans notre champ visuel supérieur » précise la jeune docteure. Elle pose donc l’hypothèse suivante : est-ce que cette préférence pour la géométrie ne serait pas liée à un traitement des caractéristiques des objets différent en fonction de leur position dans le champ visuel ? « Il faut dire que j’avais du mal à croire que se développait dans le cerveau des personnes âgées une petite zone qui marquait une préférence pour la géométrie » sourit-elle.

Un dispositif pour tester la mémoire spatiale en fonction du champ visuel

« Très peu d’études se sont intéressées à la façon dont on utilise l’information au sein de notre champ visuel, et celles qui portent sur les personnes âgées sont encore plus rares. C’est particulièrement vrai pour la façon dont la position verticale d’un objet peut impacter l’utilisation de l’information. Cependant, il est pris pour acquis qu’il y a une réduction du champ visuel supérieur dans le vieillissement, ce que m’ont confirmé des ophtalmologues de l'hôpital des Quinze-Vingts à qui j’ai pu présenter mes recherches » note Marion Durteste. « Ces bribes d’informations convergeaient vers l’idée qu’il se passe quelque chose au sein du champ visuel dans le vieillissement et que cela a un impact sur les fonctions visuelles. »

Pour confirmer son hypothèse, elle a construit un protocole pour tester la mémoire spatiale de volontaires sains. Elle a donc recruté 20 individus âgés, de 75,5 ans d’âge moyen et 25 participants « jeunes », présentant une moyenne d’âge de 29 ans. Installés devant un ordinateur, le menton calé dans une mentonnière, un traqueur oculaire braqué sur les yeux, les participants étaient invités à regarder une croix affichée au centre de l’écran. Leur était alors projetée une série d’une trentaine d’images d’objets usuels. Ceux-ci étaient alternativement présentés au-dessus de la croix, dans le champ visuel supérieur, ou en dessous, dans le champ inférieur. Après cette phase d’encodage, les participants devaient, sur une série de trente objets, identifier lesquels étaient nouveaux et lesquels leur avaient déjà été montrés. Pour les seconds, ils étaient invités à préciser dans quelle partie de leur champ visuel, haut ou bas, ces objets étaient apparus.

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Champ visuel supérieur & champ visuel inférieur.

Une perte de mémoire liée au champ visuel supérieur 

Si la cohorte de patients reste modeste, les résultats obtenus sont cependant statistiquement significatifs. Le premier d’entre eux confirme une préférence du champ visuel inférieur pour ce qui est de la mémoire des objets, et ce quel que soit l’âge des participants à l’étude. En d’autres termes, nous nous souvenons mieux des objets usuels que nous voyons dans la partie inférieure de notre champ de vision. « Cet avantage du champ visuel inférieur pour la mémorisation était un résultat attendu, qui a déjà été mis en évidence par d’autres équipes de recherche », explique Marion Durteste. « En effet, la majeure partie des objets que nous voyons dans notre quotidien sont placés en bas par rapport à la ligne d’horizon. Or, c’est l’expérience qui façonne nos préférences de champs visuel. D’ailleurs, chez les petits enfants, c’est l’inverse. Comme pour eux l’essentiel de leur environnement est au-dessus de leur tête, des études ont montré qu’ils se souviennent mieux de ce qui est présenté dans leur champ visuel supérieur. »

Mais les résultats les plus intéressants viennent de la différence de mémorisation spatiale entre champs visuel supérieur et inférieur chez les personnes âgées. Contrairement aux individus plus jeunes, les seniors ont plus de difficulté à se remémorer les objets qui leur ont été présentés dans la partie supérieure de leur champ visuel. Cependant, leur mémoire est intacte lorsque les images ont été projetées dans le champ visuel inférieur ! La situation est donc plus complexe qu’un simple « les personnes âgées perdent la mémoire spatiale ». Ces résultats, loin d’être triviaux, demandent cependant à être reproduits avec d’autres individus issus de cohortes différentes. Ils ouvrent en tout cas tout un pan de recherche qui pourrait avoir un impact important pour l’amélioration de la qualité de vie des seniors. « Le fait que ce déficit ne touche pas le champ inférieur est porteur de beaucoup d’espoir, s’enthousiasme Marion Durteste. Il est ainsi possible d’envisager de réaménager les espaces urbains et l’intérieur des bâtiments publics et institutionnels pour faciliter la navigation des personnes âgées. Ou encore d’entraîner plus spécifiquement le champ visuel supérieur à garder sa capacité d’encodage des objets quotidiens. »

La proportion d'aînés dans la population mondiale devrait passer de 12 à 22% d’ici à 2050, rendant ce type de recherches de plus en plus cruciales dans les décennies à venir.

Propos decueillis par Aline Aurias

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#Evénements

15/11/2023

« Semaine nationale de la myopie » du 20 au 26 novembre 2023

Organisée par l’Institut d’Éducation Médicale et de Prévention, dans le cadre de la campagne « Ensemble contre la myopie », la première édition de la « Semaine nationale de la myopie » entend faire mieux connaître les solutions permettant de ralentir la progression de la myopie. Elle se déroulera du 20 au 26 novembre 2023. Un an après les « Journées nationales d’information et de dépistage de la myopie », qui avaient amené de nombreux français à se rendre dans un centre de dépistage partenaire pour faire contrôler leur vision, l’organisateur et tous les acteurs de la filière de la santé visuelle vont se mobiliser cette année pour mettre l’accent sur la freination de la maladie. Guide-Vue.fr est partenaire de cette opération nationale

 

 

Information auprès du public et dépistage de la myopie

Ce rendez-vous d’information et de sensibilisation permettra notamment de rappeler aux parents que la progression de la myopie chez leur enfant n’est pas un phénomène irrémédiable. Pendant toute la semaine, les professionnels de santé impliqués dans la santé visuelle des enfants (ophtalmologistes, orthoptistes, opticiens et pédiatres) répondront donc aux questions des patients et diffuseront des supports d’information sur la freination de la myopie. Dans le même temps, plusieurs centres hospitaliers et centres de vision proposeront à tous les publics des sessions de dépistage de la myopie et de ses complications.

Lancement d’un « carnet de suivi de la myopie »

Enfin, un « carnet de suivi de la myopie » sera lancé prochainement à titre expérimental dans certains centres ophtalmologiques pilotes. Les initiateurs du projet souhaitent ainsi améliorer le suivi des enfants bénéficiant d’une solution de freination de la myopie. « Ce document a été conçu comme un outil de liaison entre les familles et les professionnels de la vue qui assurent la prise en charge de la myopie de l’enfant et le suivi du dispositif de freination mis en place », indiquent-ils.

Des cas de myopie de plus en plus nombreux

Alors que la myopie concernait seulement 15 des Français en 1950, elle touche désormais 40 % de la population dans l’Hexagone. Et à horizon 2050, les professionnels de la santé visuelle estiment que ce chiffre montera à 60 %. Les enfants sont particulièrement affectés par ce trouble de la vision. Aujourd’hui, en effet, un enfant sur cinq souffre de myopie en France et 510 000 enfants âgés de 6 à 15 ans ont une myopie évolutive, qui risque de devenir forte à l’âge adulte et qui pourrait donc entraîner des complications majeures : décollement de rétine, cataracte, glaucome... « Il existe pourtant des leviers d’actions efficaces pour enrayer ce phénomène, parmi lesquels la freination de la myopie », rappelle l’Institut d’Éducation Médicale et de Prévention. Quatre solutions ont fait leurs preuves pour ralentir la myopie évolutive des enfants et adolescents : les verres de freination, l’orthokératologie (port de lentilles rigides la nuit), les lentilles « défocalisantes » de jour et l’instillation de collyres à base d’atropine.

Des ophtalmologistes mobilisés pendant la « Semaine nationale de la myopie »

Pour consulter un spécialiste de la myopie et réaliser un contrôle de la vision, ou un examen de dépistage, ou obtenir des recommandations sur les solutions pouvant être proposées pour corriger ce trouble ou, enfin, en freiner l’évolution, la liste des ophtalmologistes associés à la campagne d’information et de dépistage de la myopie est accessible sur le site : ensemblecontrelamyopie.fr/semaine-nationale-myopie.

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#Santé

31/10/2023

Myopia Master, comprendre la modulation de la croissance de l'œil par correction optique

La perspective d’une moitié de la population myope en 2050 pourrait faire sourire. Après tout, cela fera juste plus de personnes avec des lunettes, puisque nous avons la chance d’avoir accès à des corrections optiques. Mais l’augmentation du nombre de myopes ira aussi avec une augmentation des cas de myopie forte, présentant des risques de complications telles des décollements de rétine pouvant mener à la cécité. Les projections indiquent ainsi que près d’1 milliard de personnes seraient touchées par ces myopies graves d’ici 25 ans. Pour les enrayer, il faudrait pouvoir ralentir la croissance de l’œil. Mais les approches pharmacologiques ont jusqu’ici donné des résultats mitigés. Une autre solution pourrait peut-être venir d’une correction optique. Explications avec le Dr Olivier Marre, porteur de la chaire industrielle Myopia Master, qui s’intéresse à cette piste.

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Dr Olivier Marre, directeur de recherche Inserm, chef de l’équipe "Circuits rétiniens et computation" à l’Institut de la Vision, Paris.

Au cours de notre croissance, l’œil grandit lui aussi, ce qui modifie son système optique. Tout au long du développement, ce système se réajuste donc pour que l’image captée par l’œil se focalise sur la rétine, et non pas en avant ou en arrière. Ce processus est extrêmement contrôlé, et même autorégulé. Ainsi, des expériences sur des modèles animaux, avec des lentilles forçant le focus hors du plan de la rétine, ont montré que la correction optique avait un impact sur la croissance de l’œil. La rétine semble donc capable d’analyser ce qu’elle reçoit, et d’ajuster sa vitesse de croissance en fonction de la netteté de l’image perçue. « Ceci a fait se dire à un certain nombre de personnes qu’il devrait être possible, en changeant la correction optique qu’on met devant l’œil, de contrôler, et donc de limiter sa croissance » contextualise le Dr Olivier Marre. Et ce d’autant plus que, de ce qu’ont compris les chercheurs à ce jour, ce serait à priori les informations reçues sur la périphérie rétinienne qui assureraient cette autorégulation.

Des verres de freination de myopie à microlentilles périphériques déjà disponibles 

Un certain nombre d’industriels de l’optique se sont donc attelés à proposer un verre optique qui conserve la même correction au centre, responsable de l’essentiel de la vision, mais dont les aspects optiques périphériques sont modifiés pour tenter de freiner la croissance de l’œil. Les premiers de ces verres ont été commercialisés ces quelques dernières années. Du côté des partenaires du Dr Olivier Marre, les résultats du suivi de près de 60 enfants, de 8 à 13 ans, indiquent un ralentissement de l’élongation de l’œil en comparaison avec des verres correcteurs classiques. « Dans le meilleur cas, le taux de croissance a pu être divisé par deux, ce qui est très encourageant », précise le Dr Olivier Marre. Pour autant, le problème n’est pas réglé, car l’œil continue tout de même à trop s’élonger, et que les performances sont assez hétérogènes selon le patient, probablement du fait de différence entre leurs optiques. « Ce qui est sûr, commente le Dr Olivier Marre, c’est qu’il y a un effet, et qu’en changeant les optiques, on peut ralentir la croissance de l’œil. Le souci, c’est qu’on ne comprend pas pourquoi ». Comment la rétine traduit-elle une analyse de la netteté de l’image en signal d’accélération ou de ralentissement de sa croissance ? C’est pour répondre à cette question que le Dr Olivier Marre s’est lancé dans l’aventure. Avec une application très concrète en tête : « Si on comprend mieux le mécanisme, on devrait pouvoir optimiser le design des verres, voire même de l’adapter à chaque patient pour obtenir d’encore meilleurs résultats ».

"La correction optique elle-même peut changer la croissance de l'œil"

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Myopie : découvrir l'algorithme qui traduit la netteté en signal de croissance

La question est loin d’être triviale. En effet, de nombreuses étapes, cascades de signalisation, protéines et peptides sont très probablement impliquées. « On a une idée de quelles cellules de la rétine sont susceptibles d’envoyer les signaux », précise cependant le Dr Olivier Marre. Mais la façon dont ces cellules reçoivent l’information visuelle, la traitent et en extraient l’information sur le positionnement du focus est encore un mystère. Pour le lever, le Dr Olivier Marre, ses collaborateurs à l’Institut de la Vision et ceux du département R&D d’Essilor ont obtenu, en décembre 2022, une chaire industrielle de l’ANR, pour une durée de 4 ans. Leur angle d’attaque : s’intéresser à la façon dont la rétine réagit lors d’un changement de correction optique. En projetant à l’œil des séries d’images présentant des corrections optiques différentes, en même temps qu’on enregistre la réponse de la rétine, il est possible de déterminer quelles cellules sont impactées par quel type d’image, et comment. Grâce aux modèles d’induction de myopie développés par la Dr Christina Zeitz et son équipe, un des groupes de travail du projet Myopia Master s’attelle également à élucider une question complémentaire. Celle-ci pourrait être résumée ainsi : « Est-ce qu’une rétine myope traite l’information de la même manière qu’une rétine normale ? ». En effet, la rétine myope est soumise à un influx visuel différent de celui qui atteint une rétine normale. Cela modifie sa croissance, ses réseaux de signalisation… Sur le long terme, cela a probablement un impact sur le traitement de l’information, et donc des conséquences importantes pour trouver une solution optique à la myopie.

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Dépasser la compréhension, pour faire de la prédiction

L’objectif ultime serait de pouvoir construire un modèle capable de prédire, en fonction des paramètres d’une correction optique, la façon dont la croissance de la rétine sera impactée. Les premières étapes sur ce chemin constituent donc dans un premier temps, sur la base de l’enregistrement des réactions des cellules ganglionnaires à des scènes naturelles floutées avec différentes corrections optiques, d’obtenir un résultat qui soit généralisable. Ensuite, il faudra aller tester de manière spécifique les cellules qui sont suspectées d’être responsables du signal d’arrêt de la croissance, pour déterminer quelles sont les corrections optiques qui les stimulent le plus. Ces cellules étant situées plus profondément dans la rétine, et donc assez difficile d’accès, cela demandera de passer sur un autre type de technique, à travers des collaborations avec notamment Valentina Emiliani (Institut de la Vision). Si beaucoup de personnes travaillent depuis longtemps sur la myopie, et se sont intéressés de près aux mécanismes de croissance de l’œil et à l’impact de la correction optique, l’angle proposé par le Dr Olivier Marre et ses collaborateurs a ceci d’original qu’il découple le problème en expérimentant uniquement sur la rétine, la partie optique étant entièrement simulée par informatique, ce qui permet de jouer très facilement avec les différents paramètres de ces modèles.
A termes, ce travail devrait permettre de proposer, idéalement très précocement, des corrections frénatrices aux enfants myopes, pour limiter le développement de leur myopie. Si la solution est prophylactique, et pas curative, elle n’en est pas moins essentielle vu le manque criant de prévention ces dernières décennies, qui a mené à l’explosion de myopie infantile qu’on constate actuellement. Et l’enjeu, de santé publique et industriel, est planétaire. Ainsi, la Chine, particulièrement concernée puisque 50 à 60% de ses enfants sont déjà atteints de myopie, a fait de la lutte contre ce défaut visuel une grande cause nationale.

 

Un institut français de la myopie à la fondation Rothschild

LE SAVIEZ-VOUS ? En mars 2024, l’Institut Français de la Myopie ouvrira officiellement ses portes rue Mathurin-Moreau, dans le 19e arrondissement de Paris. Dédié à la prise en charge de la myopie à tous ses stades, de la prévention jusqu’à la chirurgie et à l’accompagnement de la base vision, il accueillera en fait ses premiers patients dès le mois de septembre 2023. Cette ouverture en deux étapes permettra le bon dimensionnement des équipes techniques et médicales à recruter, pour pouvoir à termes assurer le suivi de 30 000 patients à l’année.

 

 

Propos recueillis par Aline Aurias

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#Santé

18/10/2023

Délais de rendez-vous en ophtalmologie, de plus en plus courts

La dynamique initiée depuis 2019 s’est encore amplifiée cette année. Le délai médian d’obtention d’un rendez-vous ophtalmo diminue, que ce soit pour un contrôle périodique, ou suite à l’apparition de premiers symptômes.

Pour la cinquième année consécutive, l’étude réalisée par l’institut CSA, pour le compte du SNOF (Syndicat National des Ophtalmologistes de France), sur les délais de rendez-vous en ophtalmologie révèle une très nette amélioration. En 2023, le délai médian d’obtention d’un rendez-vous dans le cas d’un contrôle périodique s’inscrit à 24 jours pour les rendez-vous pris par téléphone et passe, pour la première fois, sous la barre symbolique des 20 jours pour les rendez-vous qui sont pris sur internet. Dans le cas d’apparition de symptômes, le délai médian diminue également, passant de 10 jours en 2019 à 4 jours en 2023, soit une baisse de 60 %. Le délai moyen passant ainsi de 27 jours à 8 jours, soit une diminution de 70 %. « Depuis 2017, cette baisse atteint 70 %. Et la proportion des rendez-vous obtenus a également augmenté de 8 %, ce qui confirme la fluidification de l’accès aux soins », analyse le docteur Thierry Bour, président du SNOF.

Les rendez-vous ophtalmologiste pris sur internet progressent

L’étude indique par ailleurs que la proportion de patients renvoyés sur internet, après un appel téléphonique, diminue également. Elle est revenue à sa valeur de 2019, soit environ 10 % des cas. Selon Thierry Bour, cette évolution révèle une meilleure disponibilité des secrétaires médicales pour une meilleure prise en charge des nouveaux patients.
Néanmoins, la prise de rendez-vous sur internet continue d’augmenter et la tendance devrait se poursuivre à l’avenir. Aujourd’hui, 62 % des ophtalmologistes proposent cette solution. Les délais sont d’ailleurs plus courts pour les rendez-vous pris en ligne et la proportion des rendez-vous obtenus est également plus importante, puisqu’elle s’établit à 77 % contre 72 % pour les rendez-vous pris au téléphone.

Une amélioration constatée dans pratiquement toutes les régions

Bien que de fortes disparités existent encore selon les territoires, l’amélioration constatée au travers de cette nouvelle étude se confirme dans presque toute la France. Pour les rendez-vous pris suite à l’apparition de premiers symptômes, l’amélioration est une réalité partout, sans exception. La diminution des délais d’attente se confirme en revanche dans 11 régions sur 13, par rapport à 2019, pour les contrôles périodiques. Avec des progrès particulièrement notables en Normandie (-81 jours), en Bretagne (-73 jours), en Centre-Val de Loire (-61 jours) et en Auvergne-Rhône Alpes (-42 jours). Seules la région Grand Est, la Corse et surtout la région Pays de la Loire se distinguent, avec un allongement respectif des délais de 3 jours pour la première, de 9 jours pour la deuxième et, enfin, de 36 jours pour la troisième.
« Nous devons nous pencher sur ce cas particulier qui nous interpelle, car rien ne laissait présager cette dégradation », indique le président du SNOF.

La fluidité reste plus importante dans les grandes métropoles

Les délais d’obtention d’un rendez-vous restent bien entendu différents entre grandes métropoles et petites villes. C’est toujours dans les plus grandes unités urbaines que les délais sont les plus courts, allant de 13 jours dans l’agglomération parisienne à 54 jours pour les communes de moins de 20 000 habitants, avec des paliers à 26 jours pour les villes de plus de 100 000 habitants et 43 jours pour celles allant de 20 000 à 100 000 habitants. En revanche, l’amélioration se confirme partout, entre 2019 et 2023. C’est même dans les villes de 20 000 à 100 000 habitants que la diminution des délais est la plus marquée pour un contrôle périodique, avec une baisse des délais d’attente de 50 jours, contre 27 jours pour les communes rurales et urbaines de moins de 20 000 habitants et 18 jours pour les villes de plus de 100 000 habitants. Dans l’agglomération parisienne, la baisse constatée est de 6 jours.
« Pour l’apparition de premiers symptômes, la baisse est également générale, mais moins marquée et quasiment identique partout, variant seulement de 3 à 6 jours », précise le président du SNOF. Parmi les 10 plus grandes villes de l’Hexagone, c’est à Toulouse que l’amélioration est la plus sensible, avec une diminution des délais d’attente de 59 jours pour les contrôles périodiques et de 42 jours pour les rendez-vous pris suite à l’apparition de premiers symptômes. Mais c’est à Montpellier que les délais sont les plus courts, puisqu’il suffit de 3 jours en moyenne pour obtenir un rendez-vous, quelle qu’en soit la nature.

Objectif délai d'obtention d'un RDV ophtalmo : 15 jours de délai médian à horizon 2025

« Cette nouvelle enquête confirme la baisse continue des délais à l’échelle nationale depuis 2017, en concordance avec d’autres études et alors que le contexte démographique reste négatif en 2023, indique le président du SNOF. Cette amélioration est d’autant plus notable, qu’elle intervient après la fermeture d’une quarantaine de centres de santé ophtalmiques aux pratiques frauduleuses. Nous avons donc toutes les raisons d’être optimistes pour l’avenir, puisque nous allons enregistrer une diminution du nombre des départs en retraite, une nouvelle augmentation du travail aidé dans nos cabinets et le développement des nouvelles mesures règlementaires pour les orthoptistes. Dans ces conditions, nous espérons ramener le délai médian pour obtenir un rendez-vous à 15 jours d’ici 2025. »

Source : SNOF octobre 2023

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#Santé

11/10/2023

Le fond d'œil, source de marqueurs de maladies systémiques ?

Et si un simple examen de fond d’œil permettait de déterminer les risques d’accidents cardio ou cérébro-vasculaires, ou les suites opératoires de certaines résections de tout ou partie d’organe ? C’est l’hypothèse sur laquelle travaille le service d’ophtalmologie du CHU de Dijon. Explications avec le Dr Louis Arnould, chirurgien ophtalmologiste et membre de l’équipe, dont la recherche est consacrée à la rétine et à l’analyse de sa vascularisation.

 

 

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Dr Louis Arnould, praticien hospitalier universitaire, service d’ophtalmologie du CHU de Dijon. Laboratoire Physiopathologie et Epidémiologie Cérébro-Cardiovasculaire à l'université de Bourgogne.

L’idée de départ est relativement simple : pourrait-on étendre à d’autres pathologies systémiques que la rétinopathie diabétique l’utilisation du fond d’œil comme marqueur diagnostic et de suivi ? En effet, « avec cet examen, pratiqué en clinique courante, on a la chance de pouvoir analyser les vaisseaux de la rétine en direct » explique le Dr Louis Arnould, qui en liste les avantages : « c’est une technique non invasive, rapide et peu chère ». L’œil pourrait-il dès lors être considéré comme une fenêtre sur le système vasculaire du corps entier ? Un reflet fidèle nous informant sur les vaisseaux des autres organes du corps humain, cœur, cerveau, reins... ? Cette hypothèse, si séduisante soit-elle, est encore en cours de confirmation.

Un examen de fond d'œil comme fenêtre sur le système vasculaire du corps ?

Le fond d’œil permet de visualiser la géométrie du réseau vasculaire rétinien : le calibre des vaisseaux, leur tortuosité, la complexité de leur arborescence. Plus grande est la complexité, plus sain est le système vasculaire. A l’inverse, se pourrait-il qu’un réseau vasculaire altéré, ou anormal, soit l’indicateur d’un défaut de vascularisation dans le corps entier, et plus particulièrement d’une atteinte du cœur ? Dans ce cas, une telle altération du réseau vasculaire peut-elle être un terrain propice pour un infarctus ? C’est le sujet sur lequel s’est penché le Dr Louis Arnould durant sa formation à la recherche. A l’époque, le jeune médecin interne ophtalmologiste, spécialisé en chirurgie du segment antérieur, s’intéresse à la recherche sur la rétine. Lors de son master 2 en épidémiologie et recherche clinique dans l’unité d’épidémiologie et méthodologie du CHU de Dijon, il va avoir l’opportunité de travailler avec l’équipe de cardiologie, et notamment avec le Pr Charles Guenancia, cardiologue dans ce même CHU. Ce sera le début d’un travail qui permet de montrer, dès 2018, que, dans une cohorte de patients traités pour un infarctus du myocarde au CHU de Dijon, la densité vasculaire rétinienne était diminuée chez les patients à haut risque cardiovasculaire (1). Cette collaboration va se poursuivre durant la thèse de science de Louis Arnould à l’école doctorale de santé de Dijon, sous la direction de la Pr Catherine Creuzot Garcher, cheffe du Service d’Ophtalmologie, ainsi que du Pôle de Recherche et Santé Publique du CHU Dijon. Son sujet : l’intérêt de l’utilisation des biomarqueurs rétiniens pour la prédiction d’éléments cardiovasculaires.

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©DR

Une intuition qui se révèle payante

Pour calculer le risque pour une personne donnée de faire un accident cardiovasculaire, les cardiologues s’appuient depuis plusieurs décennies sur le calcul d’un score de risque, construit en fonction de facteurs tels que l’âge, le tabagisme, les antécédents familiaux, la présence de comorbidité comme le diabète ou l’hypertension… et étayé par des analyses statistiques d’études épidémiologiques de grande portée. Si cette approche porte ses fruits pour les personnes très à risque ou très peu à risque, elle présente malgré tout des limites en ceci qu’elle est globale, et construite sur des données essentiellement collectées sur des hommes caucasiens d’âge moyen. « Si notre hypothèse continue de se confirmer, l’analyse du fond de l’œil d’un patient donné pourrait permettre d’amener une dimension de personnalisation à la prédiction, de raffiner le score de chaque patient en adoptant une analyse composite, qui pondère le calcul de risque statistique par l’analyse de l’état vasculaire individuel » explique le Dr Arnould. Sa collaboration avec le Dr Guenancia a donné lieu à plusieurs publications (2) dont une concluant, dans le cadre de l’étude dites Montrachet qui regroupe près de 1000 patients, à une association significative entre l’état du réseau vasculaire rétinien, les facteurs de risques et les antécédents cardiovasculaires chez les personnes âgées.

L'apport des techniques d'analyse d'images rétiniennes

L’analyse de la géométrie du réseau vasculaire et de ses éventuelles altérations, est une tâche pour laquelle l’appui des logiciels d’analyse d’image est d’une grande aide. Ainsi, le standard à partir de 2010 était à l’analyse semi-automatique, confiée pour partie à un logiciel d’analyse d’image, sous la supervision et la validation d’un opérateur. Mais, en 2018, la publication d’un article (3) par l’américain Ryan Poplin et ses collègues chez Google Research va lancer l’utilisation de l’IA pour cette application d’analyse d’images médicales. Ceux-ci concluent en effet sur l’efficacité de la prédiction de facteurs de risque cardiovasculaire à partir de l’analyse de photographies du fond de la rétine grâce à des algorithmes d'apprentissage profond. Le Dr Arnould et ses collaborateurs prennent alors le virage de l’IA et délaissent les logiciels semi-automatiques, ce qui ouvre une nouvelle collaboration avec l’ICMUB, l'Institut de Chimie Moléculaire de l'Université de Bourgogne, qui travaille sur l’IA. « Dans le service d’ophtalmologie, nous n’avons pas de connaissance technique en intelligence artificielle, mais nous possédons les images, les données cliniques réelles, dont nos partenaires informaticiens et ingénieurs sont très friands pour faire progresser leurs algorithmes » commente Louis Arnould, qui précise : « nous leur fournissons une base de données annotées avec un fond d’œil, un OCT angiographique et le risque cardiovasculaire associé, pour permettre l’apprentissage des algorithmes, et ensuite on interroge la machine pour savoir si, sur la base des seules données d’imagerie on peut prédire le risque cardiovasculaire ». Car les chercheurs ne se sont pas limités à la technique du fond d’œil mais utilisent désormais également la tomographie en cohérence optique angiographique ainsi que certaines données issues des examens d’optique adaptative comme base d’analyse de la vascularisation rétinienne. « Le passage d’une technologie d’imagerie à l’autre s’est calqué sur le développement de l’imagerie en clinique ophtalmologique courante, que nous avons détournée vers nos objectifs de recherche. Et si demain il y a un autre appareil qu’on utilise en clinique courante, on l’essaiera pour la recherche » résume le Dr Arnould.

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Etendre la recherche des marqueurs à d'autres pathologies systémiques

Ce travail en cardiologie a permis d’ouvrir l’horizon des collaborations de l’équipe d’ophtalmologie au sein du CHU de Dijon. Ainsi, des recherches sont en cours avec l’équipe du Pr Yannick Bajot, chef du service de neurologie du CHU de Dijon, afin de déterminer s’il serait possible de transposer ces marqueurs de risque cardiovasculaires aux accidents ischémiques transitoires ou AVC. Et si la transposition ne peut pas se faire telle quelle, déterminer des marqueurs spécifiques de ces évènements et les mettre en corrélation avec le devenir des patients.
Dans un autre registre, le Dr Arnould collabore également avec le Dr Mathieu Legendre, néphrologue au CHU de Dijon, pour tenter de déterminer si les informations données par le fond d’œil permettraient de prédire le risque d’insuffisance rénale après une résection de tumeur aux reins, et donc le besoin de suivi plus ou moins rapproché du patient. La même chose pourrait d’ailleurs s’envisager dans d’autres chirurgies. « Les vaisseaux sanguins au niveau des reins sont très difficiles à surveiller, alors que le fond de l’œil est très facile d’accès. On peut imaginer s’intéresser à d’autres chirurgies, mais pour l’instant, ce projet est encore top secret » sourit le Dr Arnould. Car au plan international, une vingtaine d’équipes de recherche travaillent sur cette thématique de la recherche de marqueurs pronostiques et diagnostiques de pathologies systémiques dans l’architecture du réseau vasculaire du fond de l’œil. « C’est plutôt rassurant, de se dire qu’on n’est pas seuls à avoir eu l’idée. C’est qu’elle tient probablement la route, mais il y a forcément une concurrence » confie Louis Arnould.

Ses objectifs pour la période à venir s’articulent en deux axes. D’une part, continuer à développer l’analyse de l’imagerie de la rétine par IA pour le diagnostic de pathologies systémiques, et donc déterminer de nouveaux marqueurs prédictifs pour différentes pathologies d’intérêt. D’autre part, continuer à vérifier la robustesse de leur hypothèse selon laquelle l’état des vaisseaux de la rétine pourrait être extrapolé à l’état vasculaire total et refléter fidèlement l’état de santé du patient. Ceci passe par une comparaison des résultats obtenus avec différents logiciels, différentes méthodes d’analyse d’image, mais aussi entre les anciennes techniques d’imagerie et les nouvelles méthodes disponibles aujourd’hui. Avec un objectif, monter et nourrir une base de données open access associant imagerie de qualité et description des données cardiovasculaires précises qui pourra servir de support à des collaborations internationales ouvrant l’accès à encore plus de données patients pour faire progresser encore la recherche de marqueurs prédictifs.

Propos recueillis par Aline Aurias

1. Arnould L. et al. (2018) Investig. Ophthalmol. Vis. Sci. 59, 4299–4306 : doi .org/10.1167/iovs.18-24090
2. Arnould L. et al. (2018) Plos One. : doi .org/10.1371/journal.pone.0194694
3. Poplin, R. et al. (2018) Nat Biomed Eng 2, 158–164 : doi .org/10.1038/s41551-018-0195-0

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#Evénements

10/10/2023

L’AsnaV donne le coup d’envoi des Journées de la Vision 2023

Coupe du monde de rugby oblige, l’AsnaV, Association Nationale pour l'amélioration de la Vue, a placé cette année ses traditionnelles Journées de la Vision sur le thème du sport. Des tests de vue gratuits seront proposés dans toute la France du 12 au 21 octobre 2023. Un temps de dépistage, mais aussi de sensibilisation, puisque les opticiens et les orthoptistes engagés dans l’opération en profiteront pour rappeler que la vue est essentielle dans la pratique du sport, mais aussi dans toutes les activités du quotidien. 

Des tests de vue gratuits

Organisée, comme chaque année, par l’Association Nationale pour l’amélioration de la Vue (AsnaV), la 19ème édition des Journées de la Vision se déroulera du 12 au 21 octobre 2023. Appelés à prendre part massivement à ce temps fort de la sensibilisation à la santé visuelle, opticiens et orthoptistes partenaires de l’AsnaV seront, cette année encore, plus de 4 000 à travers toute la France à proposer des tests de vue gratuits. La liste de ces professionnels participants à cette opération est disponible sur le site internet de l’AsnaV : cmavue.org/opticien-partenaire >.
Une initiative qui a tout son sens au regard du dernier sondage OpinionWay pour l’AsnaV 2023, qui révèle qu'aujourd’hui, 71 % des Français estiment que les problèmes de vue sont une préoccupation de santé prioritaire.

La vue, le port de lunettes, des idées reçues à combattre

Associé à la Journée mondiale de la Vue du 12 octobre 2023, les Journées de la Vision de l'AsnaV ont pour vocation à rappeler le caractère essentiel de contrôles visuels réguliers, mais aussi du port des équipements qui sont prescrits. Non seulement pour faire du sport ! Puisque cette édition sera placée sur ce thème, avec la Coupe du monde de rugby qui se dispute en France actuellement et dans la perspective des Jeux Olympiques de Paris 2024, mais également dans toutes les activités du quotidien. Dans le cadre de son baromètre 2023 de la santé visuelle, dont la réalisation a été confiée à OpinionWay, l’AsnaV souligne en effet que de moins en moins de Français portent leurs lunettes alors qu’elles leur sont prescrites. Cette tendance se confirme aussi bien volant, qu’à vélo, en trottinette ou même face aux écrans. Dans le même temps, l’AsnaV constate que de très nombreuses idées fausses sur la santé visuelle continuent de circuler.
Ainsi, près de 40 % des personnes interrogées pensent, à tort, que ne pas porter ses lunettes permet de « faire travailler » ses yeux, ou que l’on peut se rendre compte de la survenue d’un problème de vue par soi-même. Et 72 % des personnes interrogées ignorent que la presbytie est une anomalie qui touche tout le monde après 50 ans. Un constat inquiétant, et paradoxal, puisqu’une grande majorité des personnes interrogées affirment toujours accorder une attention particulière à leur santé visuelle.

Dépister les troubles visuels : à tout âge et tout au long de l’année

Pour prolonger le travail de sensibilisation assuré durant les Journées de la Vision, l’AsnaV a initié une vague de posts sur les réseaux sociaux. Quatre temps forts vont rythmer le deuxième semestre 2023. Après un premier volet sur la thématique des enfants et des écrans, diffusé depuis le 12 septembre 2023, trois nouveaux focus seront proposés sur Instagram et Facebook. Ils porteront sur le sport, dans le cadre des Journées de la Vision, à compter du 12 octobre 2023, sur la vue au volant à partir du 21 novembre 2023 et, enfin, sur le dépistage pendant la petite enfance, dès le 5 décembre 2023 prochain. Ainsi, l’AsnaV entend rappeler aux Français que le dépistage des troubles de l’acuité visuelle est essentiel à tout âge et tout au long de l’année. L’AsnaV précise cependant que les tests de vue gratuits et non médicaux, qui sont réalisés à l’occasion des Journées de la Vision, ne sont pas destinés aux jeunes enfants, dont le développement de la vue doit être surveillé par un ophtalmologiste.

Source : baromètre de la santé visuelle 2023, sondage OpinionWay pour l’AsnaV.

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#Santé

04/10/2023

Bases moléculaires de la myopie, un modèle pour les étudier ?

C'est déjà le problème de vision humaine le plus commun au monde : la myopie devrait toucher une personne sur deux d’ici 2050. Si des facteurs environnementaux (manque de pratique de la vision de loin, d’exposition à la lumière naturelle, travail sur écran) liés à des modes de vie de plus en plus sédentaires peuvent provoquer ou renforcer la myopie, de nombreux facteurs génétiques entrent également en jeu. Une large part d’entre eux provoquent des maladies de l’œil auxquelles s’associe la myopie. On parle alors de myopie syndromique. Mais la myopie commune, isolée, peut également avoir des origines génétiques. Comment dès lors les étudier et envisager des pistes thérapeutiques ? Le point avec la Dr Christina Zeitz, experte dans l’identification des gènes impliqués dans les maladies rétiniennes.

 

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Dr Christina Zeitz, directrice de recherche Inserm, chimiste, généticienne,
co-directrice d’équipe à l’Institut de la Vision avec la Pr Isabelle Audo, et responsable du Département Génétique.

 

Si la « myopie » signifie en grec « à courte vue », elle est bien le fait d’un œil qui, lui, est trop long. Au-delà du défaut de vision qu’elle provoque, cette modification de la géométrie de l’œil peut, dans ces formes les plus fortes, entraîner des complications telles qu’un décollement rétinien ou une dégénérescence maculaire. Mais la cause de cet allongement de l’œil est loin d’être unique. En effet, des études d’associations entre myopie, syndromique ou isolée, et mutations dans les gènes exprimés dans la rétine ont permis d’identifier près de deux cents variants associés à la présence de myopie chez les patients (1). Ces gènes de risque semblent s’exprimer dans toutes les couches cellulaires de la rétine, et ont souvent une fonction connue dans la neurotransmission ou la matrice extracellulaire. Les mécanismes moléculaires exacts par lesquels les interactions entre ces mutations génétiques et l’environnement provoquent ce défaut de vision restent cependant à élucider. A termes, ces connaissances pourraient en effet permettre d’anticiper l’importance de la myopie d’un patient en fonction de son score de risque génétique. A cette fin, de nombreuses études doivent encore être menées. L’une d’entre elle, conduite par la Dr Christina Zeitz, s’intéresse au potentiel de la cécité nocturne complète comme modèle pour l’étude de la myopie. 

 

"Les patients atteints d'une forme complète de cécité nocturne présentent quasi systématiquement une forte myopie."

 

La CNCS, une pathologie orpheline, et très mal diagnostiquée

La cécité nocturne congénitale stationnaire (CNCS) est un trouble rétinien hétérogène, tant sur le plan clinique que génétique. Elle se caractérise en effet par un tableau clinique présentant un degré variable de cécité nocturne, de photophobie, d’hypermétropie, de myopie, mais peut également être associée à un strabisme, une réduction de l'acuité visuelle, un nystagmus (oscillation involontaire des globes oculaires) ... Les patients atteints d’une forme complète de cette CNCS présentent quasi systématiquement une forte myopie. Pour les personnes nées avec la cécité nocturne, il est complexe d’identifier que leurs difficultés à s’orienter dans des lieux sombres ou la nuit sont supérieures à celles de la population générale. Ce dernier point fait que cette dysfonction rétinienne héréditaire, non évolutive, est largement sous-diagnostiquée et souvent confondue avec une myopie isolée. En effet, seul un examen spécifique, l’électrorétinographie, permet de s’assurer de la présence d’une CNCS. Et il n’est pas pratiqué en routine lors de la détection d’une myopie. « J’estime ainsi qu’une personne sur 400 000 est atteinte de cécité nocturne », précise la Dr Zeitz, « contre 1/40 000 touchée par une dystrophie des cônes puis des bâtonnets et 1/3-4000 pour la dégénération des bâtonnets puis des cônes, également appelée, rétinite pigmentaire ». Vu la difficulté de diagnostic de la pathologie dans la population générale, seules une dizaine d’équipes travaillent sur ce sujet dans le monde, essentiellement des centres cliniques qui renvoient leurs patients vers la Dr Zeitz, qui a constitué la plus grande cohorte de patients atteints de CNCS.

 

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Même scène, en vision normale (au-dessus), ou vue par une personne atteinte de CNCS (en-dessous) 
© AdobeStock : EdNurg. Montage © DR Institut de la Vision

 

Des modèles pour la CNCS qui pourraient s'étendre à la myopie

Chez les patients atteints de la sous-forme complète de la CNCS (CNCSc) ont été identifiés plusieurs gènes mutés, exprimés dans les cellules bipolaires de la rétine. Dans cette pathologie, toutes les cellules de la rétine sont bien présentes. Le problème se situe au niveau des voies de signalisation. Parce qu’il n’est pas faisable d’étudier directement la rétine des patients, qu’il faudrait pouvoir prélever, la Dr Zeitz a recours aux organoïdes de rétine, ces rétines in vitro dérivées à partir de cellules de peau. Mais ces procédures étant longues et complexes, elle s’appuie également sur des modèles animaux murins. Elle travaille notamment ainsi avec des lignées de souris porteuses de mutations sur les gènes impliqués dans la cécité nocturne. Après avoir démontré que ces animaux sont effectivement atteints de cécité nocturne, la Dr Zeitz s’est interrogée : « Pourquoi est-ce que la mutation de ces gènes donne également une myopie ? Ces modèles murins sont-ils pertinents pour étudier ce défaut de vision ? ». Plusieurs éléments le laissaient penser. En effet, leur taux de dopamine, et d’un de ses métabolites, est faible. Or, on sait depuis plus de 10 ans que la rétine produit de la dopamine lorsqu’elle est exposée à la lumière naturelle, et que ce neurotransmetteur joue un rôle majeur dans le contrôle de la croissance de l’œil (2).

Au-delà de la dopamine, un ensemble de gènes différentiellement exprimés

L’œil de la souris étant très petit, il n’est pas techniquement trivial de vérifier son allongement. La Dr Zeitz et son post-doctorand, Baptiste Wilmet, se sont donc intéressés à la sensibilité de ces souris à une myopie forcée. En imposant une correction visuelle aux animaux grâce à des lentilles focalisantes, ils ont pu constater que, par rapport aux témoins « normaux », ses souris modèles développaient une myopie beaucoup plus forte. L’équipe a ainsi démontré que le modèle de souris pour la CNCSc, en plus de présenter un faible taux de dopamine, est effectivement myope (3). L’existence de ce défaut visuel s’accompagne de conséquences directes sur l’expression des gènes dans les cellules de la rétine. L’équipe a donc fait le pari d’analyser les séquences d’ARN messagers exprimés par les cellules de la rétine, qui vont commander à l’expression des protéines de l’œil.
Après prélèvement de la rétine des animaux et extraction des séquences ARN, la Dr Zeitz, ses collaborateurs de l’Institut de la Vision, et Jérome Roger, de l’Institut de Neurosciences de l’Université Paris-Saclay, ont pu identifier 52 gènes dont l’expression varie entre les animaux modèles et les souris saines. « Parmi ces gènes, la moitié étaient déjà associés à la myopie chez les patients »,souligne la Dr Zeitz. Ces différences de niveau d’expression génique peuvent expliquer la myopie constatée dans la cécité nocturne, faisant de fait de cette pathologie un bon modèle d’étude de la myopie (3). Il reste cependant beaucoup à faire pour comprendre le rôle des autres gènes qui n’ont pas encore été décrits.

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© Institut de la Vision

Une diminution d'expression à nombre de cellules constant

Pour commencer à creuser ce sujet, et affiner la compréhension du mécanisme de la myopie, la Dr Zeitz et ses collègues, dont Christelle Michiels et Helen Frederiksen, sont passées à l’échelle protéique. Elles ont ainsi vérifié, par immunofluorescence, que les protéines codées par les ARNm des gènes candidats provoquant probablement la myopie étaient effectivement moins présentes chez les animaux modèles CNCSc que chez des animaux non mutés sur ces gènes. Un comptage des noyaux cellulaires de cellules bipolaires présents dans les rétines des deux types d’animaux a permis d’exclure l’hypothèse que cette diminution dans la présence des protéines et des ARNm soit le fait d’un moins grand nombre de cellules. Il s’agit bien d’une véritable modulation de l’expression génétique, qui est très probablement le fait d’une, ou de plusieurs modifications dans les voies de signalisation rétinienne. En effet, un certain nombre de ces voies peut jouer un rôle dans l’agrandissement de l’œil, que ce soit du côté des cascades de gènes impliqués dans le développement de l’œil ou de celles par lesquelles la rétine réagit aux images qu’elle reçoit et participe au contrôle de l’allongement de l’œil (sur ce sujet, voir également l’article "Myopia Master, comprendre la modulation de la croissance de l'œil par correction optique").

Un essai clinique pédiatrique prometteur 
L'essai Childhood Atropine for Myopia Progression (CHAMP), est un essai clinique randomisé de phase 3, en double aveugle, contre placebo. Mené du 20 novembre 2017 au 22 août 2022, il a concerné 576 participants de 3 à 16 ans, qui ont reçu quotidiennement un collyre placebo ou contenant de l’atropine à faible dose (0,01% ou 0,02%). Publiée le 1er juin 2023, l’analyse des résultats de cet essai suggère un effet cliniquement significatif de l'atropine à 0,01 % de concentration, par rapport au placebo, qui se traduit par une réduction de la progression de la myopie et de l'allongement axial.
Selon l’équipe de recherche, dirigée par la Pr Karla Zadnik, doyenne de l'Ohio State University College of Optometry : « l'efficacité évidente de l'atropine 0,01% dans le ralentissement de la progression de la myopie et de l'allongement axial peut conduire à des changements de lunettes moins fréquents ou retardés, à une progression vers une correction moins sévère et à une réduction potentielle des séquelles à long terme, qui pourraient conduire à une perte de vision plus tard dans la vie, comme la maculopathie myopique. »

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© Institut de la Vision

Vers la compréhension d'autres pathologies, à défaut de leur traitement ? 

La Dr Christina Zeitz fait l’hypothèse que, chez les patients atteints de cécité nocturne, l’effet sur l’expression des gènes est similaire à celui d’un manque d’exposition à la lumière naturelle, si cruciale pour stimuler l’expression de nombreux gènes dans la rétine. Et c’est pour cela qu’ils développent une myopie. « Il existe d’autres maladies rétiniennes où il y a le même problème de myopie associée, par exemple des rétinites pigmentaires. Il serait intéressant de vérifier si on y retrouve les mêmes gènes différentiellement exprimés », s’enthousiasme la Dr Zeitz. Au-delà de la compréhension théorique des mécanismes menant à la myopie, se pose évidemment la question des pistes thérapeutiques. Christina Zeitz, qui ne travaille pas personnellement sur le versant thérapeutique, s’y est intéressée dans le cadre d’une revue qu’elle a écrit sur le potentiel de l’étude de la cécité nocturne pour améliorer la compréhension de la myopie (4). Ainsi, si des essais animaux prometteurs ont eu lieu avec de la dopamine, ceux-ci s’arrêtent au niveau des primates non humains. Des essais cliniques pour freiner la progression de la myopie grâce à l’atropine ont également lieu, dont l’un vient tout juste de publier, début juin 2023, des résultats très encourageants obtenus sur une cohorte de près de 500 enfants suivis sur trois ans (5) (voir l'encadré "un essai clinique pédiatrique prometteur").

Pour autant, la route risque d’être longue avant de trouver un traitement complet à la myopie.« De très nombreuses voies de signalisation étant impliquées, il s’agira surement de trouver un cocktail de molécules, probablement à délivrer sous formes de collyre » prévoit la Dr Zeitz, qui rappelle le gain de confort issu de la prise en charge de la myopie par des verres correcteurs.

Propos recueillis par Aline Aurias

1. Tedja MS et al. (2019) doi : 10.1167/iovs.18-25965
2. Morgan IG et al. (2012) doi : 10.1016/S0140-6736(12)60272-4
3. Wilmet B. et al. (2022) doi : 10.3390/ijms24010219
4. Zeitz C. et al. (2023) doi : 10.1016/j.preteyeres.2022.101155
5. Zadnik K. et al. (2023) doi : 10.1001/jamaophthalmol.2023.2097

Photo en vignette : © Institut de la Vision - SU_PKitmacher

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